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La sécurité nationale à la lumière de la transition démocratique : l’exemple de la loi anti-terroriste

 Le 11 septembre 2001 représente un tournant dans la politique de sécurité au niveau international avec l’avènement d’une nouvelle ère dans la lutte contre le terrorisme. Les attentats du World Trade Center marquent le début d’une nouvelle stratégie politique appelée la guerre anti-terrorisme.

Cela va s’illustrer dans les législations nationales de plusieurs pays, notamment la Tunisie, où elle va être instrumentalisée par l’ex-président Zine El Abidin Ben Ali pour justifier la répression et le verrouillage de la société face à la communauté internationale. Ce sera également un prétexte pour lutter contre les opposants politiques de tous bords.

En Tunisie, le traitement de la question du terrorisme par le gouvernement et l’assemblée, ainsi que la société civile, s’est fait dans le soucis d’une recherche d’équilibre entre une lutte efficace contre le terrorisme et la nécessité de préserver les acquis fragiles en matière de droits de l’homme fraîchement garantis par la nouvelle constitution tunisienne.

C’est dans ce cadre de transition démocratique et de recherche des outils de la bonne gouvernance, que la commission des droits de l’homme, des libertés et des relations extérieures,  ainsi que la commission de la législation à l’ANC,  ont procédé a l’étude d’un projet de loi qui fut élaboré par une commission technique mise en place par le ministère de la justice et à laquelle ont pris part des experts spécialisés dans le droit et les questions de sécurité.

La nouvelle loi sur les actes terroristes devrait remplacer la loi anti-terroriste de 2003 qui a, depuis, été abrogée, car jugée anticonstitutionnelle. Cette problématique génère une divergence d’opinions entre les députés qui s’opposent sur la nature de la lutte contre le terrorisme et les formes que cela doit prendre.

Pour sa part, Eskander Bouallegue du mouvement « El Mahaba » (anciennement Pétition Populaire) estime que nous avons besoin d’une loi spécifique dite anti-terroriste, pour ne pas exclure la Tunisie de la stratégie internationale de lutte contre la violence. Cependant, soutient-il, le projet du ministère de la Justice n’est qu’une traduction superficielle d’un ensemble de traités internationaux et ne prend  pas en considération les spécificités nationales du pays.

  Il ajoute que ce projet n’est pas constitutionnel à plusieurs égards. Par  exemple, il est en  contradiction  avec le principe de liberté de déplacement ainsi qu’avec l’engagement de soutien envers les mouvements de libération palestiniens.

M. Bouallegue affirme également que ce projet est en conflit avec la nécessité de créer un équilibre entre le châtiment et le crime commis. Enfin Iskander Bouallegue dénonce le manque de précision en ce qui concerne le trafic d’armes.

Quant à  Ahmed Smaii, député du mouvement Ennahda, il dénonce l’association entre une peine donné et un crime que l’on qualifie de terrorisme mais dont  la définition demeure ambiguë. Il considère que la loi de 2003 est plus cohérente au niveau de la forme que le projet de loi actuel qui se contente de mentionner de façon généraliste «formation d’un gang», « trouble à l’ordre public » et « violence contre la police ».

Il ajoute qu’il faut clarifier le problème relatif à la protection des témoins, mais aussi la présence de l’avocat dès les premières heures de l’arrestation, le secret professionnel, l’instruction, le respect de la confidentialité du courrier,la préservation des droits des prévenus et  les délais de garde à vue.

Dans le même contexte, la députée  Nadia Chaâbane du Bloc Démocratique déclare la nécessité d’une loi anti-terrorisme  pour instaurer un climat de sécurité  et relever le défi de la lutte contre la violence.

Elle cite le phénomène de propagation des armes légères, la montée des mouvements extrémistes et des réseaux terroristes,et  la prolifération du crime organisé.Quant au projet de loi, Nadia Chaâbane le perçoit comme acceptable dans son intégralité.Selon elle, il reste à améliorer  l’aspect préventif de la loi et d’adapter en plus les sanctions par apport aux actes criminels.

Elle ajoute que  la promulgation d’une loi pour lutter contre le terrorisme, doit garantir les droits de l’homme  et ce en consacrant deux droits essentiels, le droit à la vie et le droit à la sécurité.

AzadBadi du Mouvement Wafa, quant à lui, reproche à plusieurs personnalités impliquées dans la rédaction du projet de loi d’amplifier de manière délibérée son caractère exceptionnel. Il indique que certains articles  feraient replonger le pays dans le même régime dictatorial et tyrannique de l’avant-14 janvier 2011.

Il souligne que le projet de loi  n’est que le prolongement de l’ancienne loi de 2003 alors que cette nouvelle version post-révolutionnaire devrait  garantir  l’adéquation entre une lutte efficace contre le terrorisme et la sauvegarde des droits de l’homme tels que stipulés dans la Constitution.

A l’issue de ce travail de recherche, Jasmine Foundation pour la recherche et la communication, considère que l’Assemblée Nationale Constituante doit donner l’opportunité d’un dialogue ouvert avec la société civile sur cette question précise.

Nous recommandons donc aux parties prenantes impliquées dans la rédaction du projet de loi anti-terroriste d’organiser des audiences avec des experts, des spécialistes, des activistes pour les libertés publiques avant le vote final de la loi de lutte contre le terrorisme.

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